La Carretera Austral
- philippe viejo
- 29 nov. 2016
- 7 min de lecture
Nous passons la frontière du chili au niveau de Chile Chico, porte d’accès à la carretera australe, nous nous rendons au magasin de gaz (pas de gaz) et dans la rue nous tombons parechocs contre parechocs sur … les vagueauvent. Les enfants sont toujours aussi heureux de se retrouver et les parents aussi. Ils nous quittent pendant que nous allons faire les réserves de provisions. A la caisse, la caissière semble complètement à l’ouest, elle tourne au red bull. Elle tente de passer la carte (tout de même des courses à 221 €) et nous annonce que le paiement n’est pas passé, je lui donne donc tout le liquide chilien que j’ai et nous faisons le complément en carte là tout se passe bien. Quelques jours plus tard, nous découvrirons que le premier règlement était passé …
Nous nous élançons vers la carretera, la piste est un peu difficile mais le paysage est superbe, vue grandiose sur le lac Buenos Aires. Après une vingtaine de kilomètres sur le bord de la route un bivouac incroyable et Lalie et Céleste des vagueauvent qui accourt pour nous indiquer le chemin à suivre, nous passons encore une excellente soirée en leur compagnie autour d’un feu de bois, de pommes de terre cuites au feu et de ribs à la chilienne, au dessert une délicieuse béchamel au chocolat de Sandra.


Le lendemain, nous descendons jusqu’à Cochrane sur la carretera austral, nous avons un rendez-vous radio et savons qu’il y a une connexion libre dans ce village. Nous nous installons donc sur la place du village pour pouvoir capter. Le dimanche super, le lendemain date de l’enregistrement la connexion ne se fait pas … Et finalement fonctionne et plante … Bref nous aurons une brève interview avec Eric Lange pour l’émission Allo la planète, mais un autre enregistrement est prévu très bientôt qui sera je l’espère cette fois plus concluant.
Nous nous élançons vers le parc Patagonia qui est en construction et est privé. A l’entrée, de belles maisons en bois et en pierre, après l’explication du garde parc, j’aperçois dans un petit encart sur la carte le nom de Lucas Bridge, je pose la question à savoir si c’était le fils de Thomas Bridge d’Ushuaia on me répond par la positive, le fils a élevé des moutons pour la nurserie de l’Estancia Harberton à plus de 1000 kilomètres de là !
L’entrée du parc est gratuite et nous nous décidons à aller au camping qui est lui payant mais a des douches, le chemin d’accès est en cailloux non tassés et le camping-car doit rester sur un parking à une centaine de mètres des installations, nous n’y restons pas mais devons prendre un grand élan pour tenter de remonter la pente et laissons de grandes ornières derrière nous. Plus loin, un petit chemin nous éloigne du centre du parc et nous trouvons un emplacement sur le bord de la rivière, Patagonia est un parc en devenir, les terres ont été achetées par les époux Tompkins (Patagonia pour elle et North Face et Esprit pour lui) dans le but de faire revenir les animaux sauvages et supprimer l’exploitation humaine des terres.
Nous rencontrons un vieux gaucho qui traverse à cheval une rivière puissante pour venir à notre rencontre. L’homme qui doit avoir environ 80 ans engage la discussion, à notre question il y a-t-il des pumas ? Il nous répond oui il y en a beaucoup mais maintenant on ne peut même plus les tuer.
Une belle balade s’en suit, un beau pont suspendu pour traverser la rivière a été construit pour préparer sans doute une future randonnée, nous faisons donc ce que nous préférons : partir au travers des chemins non balisés jusqu’à une belle cascade, en chemin nous trouvons des traces de passages du puma, des animaux ont été dévorés, des belles traces de pas sont présentes également.
Après une nuit très calme, nous partons en direction de la confluence entre le rio Baker et le Neff, les eaux turquoise d’un côté et bleu profond de l’autre se rejoignent. Nous trouvons un bivouac surplombant la confluence, après un repas barbecue à l’Argentine pris au soleil avec une vue à 3 millions de dollars au moins, nous faisons la connaissance d’une charmante famille de Crozon (si, si, ça ne s’invente pas, l’endroit où j’ai passé toutes mes vacances petite …) qui est en tour du monde sac à dos, los renardos, nous arriverons peut-être à nous recroiser un peu plus haut. Une petite partie de pêche débute avec promenade toujours en dehors des sentiers battus jusqu’à la confluence, au retour nous trouvons un petit mot des vagueauvent qui sont passés par là et remontent.

Au matin, pour sortir de notre bivouac, nous prenons une mauvaise pente et pof … une des roues se retrouve en l’air, impossible d’avancer ou de reculer, après plusieurs solutions recherchées, nous parvenons à trouver celle qui nous a permis de sortir de là. Avec le cric nous avons soulevé le camping-car et placé une pierre sous la roue et retiré le cric, au bout d’une heure nous reprenons la route et nous retrouvons finalement les vagueauvent sur la route le lendemain matin, nous nous engageons dans un petit chemin pour aller voir les cuevas de marmoles à côté de la ville de Puerto tranquillo, le chemin est très très pentu, nous nous demandons si nous pourrons remonter ? Les vagueauvent sont arrêtés sur un petit parking sur le bas-côté partis faire un repérage du bas, nous nous garons et au moment de repartir pas moyen, nous essayons de faire une manœuvre et le camping-car glisse vers le vide … inquiétant. Nous mettons des grosses pierres sous chaque roue, les vagueauvent ont réussi à remonter, nous essayons de trouver quelqu’un pour nous sortir de là et en désespoir de cause nous demandons à quelqu’un d’aller chercher un dépanneur au village d’à côté, entretemps les carabineros arrivent en proposant de nous aider mais ils n’ont pas de quoi nous tracter, le dépanneur parvient à notre niveau au bout d’une bonne heure avec son terrano II. Il évalue la situation avec un regard très perplexe mais nous fait décoller difficilement, les carabineros et d’autres personnes nous aident un peu à pousser et nous voilà sorti d’affaire après une grosse frayeur en remontant avec Thomas nous étions dans le 4x4 et une voiture est arrivée en face, nous ne pouvions pas passer à deux véhicules, j’ai vu les pneus s’approcher dangereusement du précipice, je me suis retourné vers le dépanneur Alejandro en lui disant -Seguro !! Si, si, seguro !!! Je nous imaginais faire le dernier plongeon, finalement la voiture a reculé et s’est garé où il a pu et nous avons continué notre petit bonhomme de chemin jusqu’en haut de la route où les vagueauvent et Samuel nous attendaient …
Nous continuons donc cette carretera austral après un petit paysage à Puerto tranquillo et l’achat de sandwichs à la chilienne, délicieux avec dégustation à 5 heures de l’après-midi.
Le lendemain, le 9 novembre vers les 15 heures pour nous remettre de nos émotions nous décidons d’aller dans un camping pour prendre une bonne douche et nous offrir un moment de répit, l’application ioverlander vante le camping de Sandra et Nacho, las torres de Simpson, nous y sommes accueillis comme des rois, connexion internet, douche chaude, petite ferme bio, immense salle à manger avec un dortoir et une cuisine et au centre un foyer, c’est le feu patagon, le toit est ouvert pour laisser échapper la fumée. Nous nous installons dans le grand champ, passons nos messages, puis Nacho nous propose un cours de dégustation du maté où il nous explique l’histoire de la boisson typique, comment elle se consomme avec beaucoup de détails très intéressants, la yerba est arrivée au Chili grâce aux Guachos qui ne connaissent pas les frontières avec leurs troupeaux. Le maté a surtout une valeur conviviale c’est une boisson qui se partage, une personne s’occupe de remplir le maté qui est le récipient où l’on met la Yerba maté et le distribue au fur et à mesure, la personne qui reçoit le maté doit finir sa boisson et le rendre au serveur qui le remplit et le donne à la personne suivante, Une personne qui boit le maté peut aller très vite pour le boire mais pas trop lentement pour ne pas léser les autres. Tant qu’une personne ne dit pas Gracias c’est qu’elle veut encore boire, donc le cercle continue, tout un cérémonial…
Après ce très intéressant moment de partage, nous retournons au camping car, commandons du pain à Sandra qui le prépare elle-même et qui est délicieux, en bon français que nous sommes ... Et voyons arriver les vagueauvent ! Il était encore une fois très peu probable que nous nous retrouvions ensemble à cet endroit mais aillant la même façon de voyager et des intérêts communs il n’est pas étonnant que nous nous rencontrions sans concertations préalables.
Ils s’installent au camping. Commence une soirée mémorable, nous faisons notre grillade sur le feu patagon et dinons en compagnie de deux amis allemands d’une soixantaine d’année à moto qui font la carretera austral. Sandra et Nacho restent avec nous et à la fin du repas sortent les guitares et nous font un petit bœuf autour du feu, nous cherchons une chanson que tout le monde pourrait connaitre et nous nous décidons pour Manu Chao (qui viendrait d’ailleurs régulièrement par là) Me gustas tù … Que demander de plus …

Le lendemain, pour les enfants c’est cours appliqué d’agriculture biologique, Nacho un espagnol installé depuis une quinzaine d’année au Chili, nous présente ces plantations, explique comment fonctionne cette agriculture si peu développée au Chili où règne Monsento en maître. Il nous montre ses outils bricolés main, les enfants s’exercent à les manipuler. Nous avons du mal à quitter ce couple si sympathique, les discussions sur les us et coutumes chiliennes ont été très riches. Excellent moment de partage. A midi, nous quittons tout le monde pour reprendre cette route qui nous donne du fil à retordre, les abords sont très beaux, les forêts ont des allures de forêts tropicales, nous roulons pendant quelques kilomètres sur une route asphaltée mais malheureusement la carretara en comporte très peu, elle est de plus en construction de toute part donc Philippe négocie chaque kilomètre. Nous trouvons un bivouac sur le bord de la route cachés par un énorme rocher sur le bord du fjord, dans la soirée nous observons des dauphins de peale en troupeau d’une dizaine, une atmosphère d’une sérénité impressionnante.
La traversée de la carretera se termine par 2 bivouacs au bord de deux rivières, n’ayant toujours pas de gaz et impossible de trouver une entreprise pour nous remplir nos bouteilles, nous fonctionnons avec le petit réchaud de camping depuis presque 10 jours donc c’est cuisine au minimum. Les garçons rêvaient depuis des années de fumer leur poisson, ayant pêché quelques beaux spécimens de truites, ils préparent un fumoir artisanal en se servant des grandes feuilles de rhubarbe que l’on trouve partout aux alentours, un petit feu là-dessous et c’est parti pour 2 heures de fumage. Nous nous sommes régalés le lendemain de nos truites.
Commentaires